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  • 12.11.2021

6,5 millions consacrés aux jeunes en décrochage

Le Fonds social européen investit massivement, via le programme Intitiative pour l’emploi des jeunes (IEJ), pour les jeunes ni en études, ni en emploi ni en formation ; les fameux « NEET », de l’anglais Neither in employment nor in education or training. Quel bilan tirer de cet investissement ? Nous avons interrogé Béatrice Eveno, Responsable de l’évaluation et du suivi de la performance du FSE à la DGEFP (direction générale emploi formation professionnelle) et établi un comparatif au plan européen. 

Quel est le bilan de l’enquête annuelle sur les NEET ?

Cette enquête s'intéresse à la situation à 6 mois des participants sortis des opérations du programme IEJ, l’Initiative pour l’emploi des jeunes. Ce programme finance les actions en faveur des jeunes NEET de moins de 30 ans. Il est abondé par le Fonds social européen (FSE) et vise à guider les participants vers une sortie positive : soit vers l'insertion professionnelle, soit vers la formation. 
La dernière enquête 2021 montre une baisse d’un point de pourcentage du taux d’insertion par rapport à la moyenne observée sur 2016-2020 pour ces jeunes. 93% ont moins de 25 ans et la motié ont 20 ans et plus. Au global :
- 49% de participants sont en emploi six mois après leur sortie de l’IEJ
- 10% en formation (hors apprentissage)
Contrairement aux participants FSE relevant de l'inclusion sociale, l'enquête ne fait pas ressortir les effets de la crise sur les participants IEJ. On constate néanmoins toujours un taux d'emploi à 6 mois de 5 points de moins pour les jeunes en situation défavorisée.

Entre 2014 et 2021, près de 600 000 jeunes ont été soutenus par l’IEJ. Ils représenteraient environ 20% des jeunes NEET par an en France.  
Selon l'évaluation d'impact, mutualisée avec les Régions et réalisée en 2018, parmi les NEET accompagnés, ceux qui s’insèrent le mieux sont, sans surprise, les moins éloignés de l’emploi. En revanche, les jeunes aux difficultés très diverses (une scolarité initiale arrêtée au collège, handicap, rupture familiale...) et très éloignés de l'emploi, requièrent une aide spécifique et renforcée. Nous devons les remobiliser et les ancrer dans un parcours d'accompagnement d'insertion adapté, plus spécifique.
 

Parmi les NEET quelles sont les catégories les plus vulnérables ?

Je citerais les femmes, souvent de jeunes mères souhaitant s’occuper de leur enfant. D’une manière générale, les femmes sont plus impactées par la situation familiale. Nous constatons qu’elles occupent d'avantage les emplois en CDD (contrat à durée déterminée) que les hommes. La seconde catégorie vulnérable est celle des 15-20 ans, en décrochage scolaire. 

Comment aider les NEET ?

Les solutions pour les accompagner vers l’insertion socio-professionnelle reposent notamment sur le cofinancement de dispositifs par l’IEJ. Via les Dreets (Directions régionales de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités), nous finançons des associations et des acteurs locaux, souvent porteurs de solutions innovantes. L'IEJ a également soutenu deux grands dispositifs nationaux : la Garantie jeune, portée par Pôle Emploi et l'Accompagnement intensif des jeunes, porté par les missions locales. La plus grande difficulté est de repérer les jeunes en difficultés : 40% échapperaient au service public de l'emploi. C’était d’ailleurs l’objet du PIC (plan d’investissement dans les compétences), d’identifier et de mobiliser ces publics invisibles.

Le profil des NEET en France

En France, Les études de la Dares* et de l’Insee* montrent que les NEET regroupent aussi bien des jeunes en décrochage scolaire ou en difficulté temporaire (3 mois ou moins), que des jeunes confrontés à l’absence d’emploi ou de formation pour des durées plus longues (un an au minimum).  Les plus nombreux et les plus fragiles sont les pas ou peu diplômés (niveau inférieur au CAP ou au BEP). Parmi les NEET, on comptabilise également de jeunes mères éloignées de l’emploi, mais aussi des diplômés de l’enseignement professionnel au chômage de courte durée, des bacheliers en attente de reprise d’étude ou encore les jeunes diplômés de l’enseignement supérieur à la recherche d’un premier emploi. En 2019 en France (hors Mayotte), on comptait environ 1,5 million de NEET, soit 12,9% des 15-29 ans. 

*Étude Insee réalisée en 2019 et publiée fin mars 2021 
Les jeunes ni en emploi, ni en études, ni en formation : jusqu’à 21 ans, moins nombreux parmi les femmes que parmi les hommes - Insee Focus - 229

**Étude DARES sur la situation des NEET en 2018 et publiée en février 2020
Les jeunes ni en études, ni en emploi, ni en formation (NEET) : quels profils et quels parcours ? | DARES

Les NEET en Europe, constats et comparatifs

Depuis le début de la pandémie de Covid-19, le taux de jeunes NEET dans l’Union européenne a nettement augmenté, passant de 16,4% en 2019 à 17,6% en 2020. Une évolution qui rappelle le saut de 2 points de pourcentage l’année où la crise économique et financière mondiale a frappé entre 2008 et 2009. Ces proportions élevées de NEET inquiètent les spécialistes, rapporte Eurostat dans une étude des données de l’année 2020. En effet, les crises économiques à répétition depuis 2008 menacent l’accès au marché du travail de toute une génération de jeunes Européens. A l’échelle individuelle, cela augmente les risques de pauvreté et d’exclusion sociale. Sur le plan économique, les capacités productives gâchées, ajoutées au coût des prestations sociales démultipliées, représentent des pertes considérables.


En analysant le profil des jeunes NEET à l’échelle européenne, on retrouve des similitudes d’un pays membre à un autre. Globalement, la part des jeunes en éducation et en formation augmente, tandis que celle des jeunes employés et qui ont quitté les systèmes scolaires diminue (-3,4%). Des tendances liées au manque d’opportunités professionnelles dû au marasme économique, avance le rapport d’Eurostat. Sur un marché du travail à la compétitivité accrue, poursuivre ses études pour obtenir des diplômes plus élevés représente une stratégie pour se démarquer des autres candidats à l’emploi. 
Les disparités sont aussi liées au genre, au niveau d’éducation et à la situation géographique des jeunes Européens. Plus d’une femme sur cinq entre 20 et 34 ans est NEET, contre moins d’un homme sur sept dans cette tranche d’âge. Les jeunes adultes vivant dans des zones urbaines ont moins de chances d’être sans emploi, éducation ou formation, sauf dans 4 pays dont leurs villes sont plus susceptibles d’héberger des NEET : la Belgique, l’Autriche, l’Allemagne et les Pays-Bas. Dans la majorité des pays de l’UE, les zones rurales enregistrent les taux de NEET les plus élevés. Enfin, un jeune adulte européen avec un niveau d’éducation limité (début du collège) a quatre fois plus de probabilités d’être NEET qu’un jeune passé par l’enseignement supérieur.