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  • 19.07.2021

Rencontre avec… L’ALFI

Près de 3 millions de personnes sont mal-logées en France selon le rapport 2020 de la Fondation Abbé Pierre. D’autres chiffres sont également alarmants : 143 000 personnes sont sans domicile et 643 000 en hébergement contraint chez des tiers. Le FSE Mag a pu discuter avec Guillaume Brugidou et Mélanie Gervais de l’ALFI, une association qui accompagne des populations précaires ou isolées vers du logement social durable à Paris et en région.

« Le logement est vraiment un déterminant de santé : sans toit, on n’est rien, on ne peut pas se reconstruire », assure Guillaume Brugidou, Délégué général de l’ALFI. Créée en 1955, l’Association pour le Logement des Familles et des Isolés travaille sur l’habitat inclusif et la politique du Logement d’abordLe but : accueillir, loger et accompagner des publics fragilisés vers l’autonomie et des solutions de logement durables.

Les pensions de famille sont le programme phare de l’ALFI depuis une dizaine d’années. Une mesure de financement public « extrêmement astucieuse », estime M. Brugidou, qui décrit des petites communautés de 15 à 30 logements où sont accueillies des personnes sorties de longs parcours de rue ou d’errance. Après avoir vécu d’hôtel en hôtel ou dans des centres d’hébergement, l’ALFI met à leur disposition un logement avec une cuisine équipée et des espaces communs à partager avec les autres occupants.

Ces pensions de famille sont animées par un responsable de résidence et un travailleur social qui « facilitent l’inclusion sociale de ces personnes qui pour la première fois vont pouvoir retrouver toute leur citoyenneté et avoir un vrai projet de vie », explique-t-il. Le Délégué général estime que cette mesure “à dimension humaine” permet « d’avoir du temps, le bien le plus précieux dans notre travail » pour aider des publics en souffrance psychique, parfois en rupture familiale ou victimes d’une addiction.

pension_de_famille

Un “miracle administratif” de droit commun

Les pensions de famille ne sont pas une aide sociale mais relèvent du droit commun, souligne Guillaume Brugidou. Le loyer, environ 450 euros tout compris, est financé en grande partie par l’Aide personnalisée au logement (APL). Les résidents payent ensuite un résiduel en fonction de leurs ressources : entre 70 et 140 euros par mois, selon s’ils touchent les minimas sociaux, l’AAH ou un minimum vieillesse, etc. L’accompagnement est, lui, rendu possible par le Programme 177, porté par le Ministère de la cohésion des territoires. Enfin, les logements proviennent du parc social des Entreprises sociales de l’Habitat (autrefois appelées SA HLM) du Groupe Arcade-VYV dont fait partie l’ALFI.

Le Délégué général loue ce « miracle administratif » : l’une des seules solutions de logement à proposer un hébergement à vie aux plus fragiles. Mais il pousse un “cri de colère” et rappelle que l’espérance de vie des personnes sans domicile ne dépasse pas les 50 ans, contre environ 80 ans en moyenne en France. « Ce sont trente ans de volés » à ces gens, insiste celui pour qui l’habitat inclusif en logement protégé pourrait être décliné à d’autres publics : familles monoparentales et femmes victimes de violences, par exemple. Au long cours, les pensions de famille sont une réelle promesse de santé physique et mentale, et d’insertion sociale.

Le logement est un déterminant de santé : sans toit, on n’est rien, on ne peut pas se reconstruire.

Guillaume Brugidou,

Délégué général de l'ALFI

En plus des 9 pensions de familles à Paris et en région, l’ALFI gère aussi 22 résidences sociales pour jeunes actifs. A leur arrivée dans ces logements temporaires, 60 à 70% de ces jeunes sont dans une situation précaire : hébergés à l’hôtel, par des amis ou de la famille, en “décohabitation” sans domicile fixe. L’ALFI profite de cette première expérience de logement transitoire pour accompagner les jeunes dans l’acquisition des droits et des devoirs d’un futur locataire. En moins de deux ans, l’objectif est qu’ils sachent « entretenir un logement et payer une redevance sur le long terme », explique la directrice du Pôle accompagnement social de l’ALFI Mélanie Gervais. Ils reçoivent également une aide administrative sur la recherche d’un logement, notamment social.

Avec environ 3 000 personnes logées chaque année dans plus de 1 900 logements meublés, le projet social d’intérêt général de l’ALFI repose sur un équilibre économique délicat, rendu possible par des bailleurs sociaux fiables et un financement prenant en charge à la fois “l’aide à la pierre” et l’accompagnement des publics fragiles dans le temps. « Le secret, c’est le temps… c’est précieux pour nous », conclut Guillaume Brugidou.

Les autres chantiers de l'ALFI

Accompagnement des jeunes adultes issus de l’ASE ou MNA en fin de prise en charge

L’ALFI collabore avec les départements du Val d’Oise et des Yvelines pour apprendre à ces jeunes issus de l’Aide sociale à l’enfance (ASE) ou mineurs non-accompagnés (MNA) à gérer un budget, ouvrir un compte en banque et s’insérer professionnellement après la fin du contrat jeune qui tombe parfois brusquement entre 18 et 21 ans.
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Programme “10.000 logements accompagnés”

Dans le cadre de la politique nationale du logement, l’ALFI travaille avec la Croix-Rouge et l’ESH Antin Résidences au relogement de personnes isolées, familles et couples dans le parc social après de longs séjours à l’hôtel. La mission a débuté en 2019 et a permis de reloger environ 45 familles à ce jour.
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Recherche universitaire collaborative

Certains résidents des pensions de famille participent à des travaux de recherche sur des thèmes de la santé et du logement. Formés à la recherche, ils travaillent avec des chercheurs et des professionnels de la santé à une réflexion sur des nouveaux modes d’accompagnement des personnes avec un parcours de rue.
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Accompagnement social spécialisé

L’ALFI a été missionnée par le Conseil départemental de l’Essonne pour mettre en place des mesures dites MASP2 (Mesures d’accompagnement social personnalisé de type 2). Ce dispositif permet d’accompagner des ménages en situation d’expulsion locative et/ou en grande difficulté économique. L’association met à leur disposition un travailleur social spécialiste de la gestion de budget pour sécuriser leur maintien au logement notamment.
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